Fiche 3 : l’arrivée du chemin de fer et le développement du quartier de la gare

| Partie 1 C) |



Sous la Monarchie de Juillet, la construction de voies de chemin de fer participe au désenclavement et au développement d’un département éloigné des grandes régions économiques nationales. Dans les années 1840, la Compagnie des chemins de fer d’Orléans – dont l’actionnaire principal n’est autre que le marquis Léonce de Vogüe, propriétaire des usines de Mazières à Bourges – et les responsables des grandes entreprises du Cher cherchent à prolonger la ligne Paris-Orléans jusqu’à Vierzon et Bourges. En 1844, le gouvernement décide qu’une bifurcation à partir de Vierzon conduira une ligne vers Clermont-Ferrand, en passant par Bourges, tandis qu’une autre ligne ira vers Limoges via Châteauroux. On projette de construire une gare provisoire en 1846 près des usines Mazières, ce qui permettrait d’y établir un pôle industriel important et d’envisager un développement industriel efficace de la ville. Malgré le soutien du comte Jaubert, député orléaniste du Cher et ministre des travaux publics dans le gouvernement Thiers, le projet est rejeté par les notables locaux légitimistes qui représentent la grande propriété terrienne. Ces derniers se méfient de l’industrie et du chemin de fer. Ils craignent aussi que le rail concurrence le canal de Berry, ouvert depuis 1839. La municipalité ne croît donc pas à l’avenir du rail à cette période et choisit d’installer une gare provisoire avenue d’Orléans, c’est-à-dire à l’extérieur de la ville, loin des habitations.


Le tronçon Vierzon-Bourges est inauguré le 19 juillet 1847 et permet d’acheminer du matériel, des marchandises et des matières premières pour Bourges (document 17). Le « Journal du Cher » organe du lobby ferroviaire, raconte la cérémonie d’inauguration et multiplie les commentaires favorables. Dans l’embarcadère provisoirement installé à l’angle de la route d’Orléans et de l’avenue des Prés le Roi, une tente pavoisée avec élégance attend plus de douze cent personnes, dont de nombreuses personnalités représentant les pouvoirs économiques, militaires et religieux régionaux.


La gare de Bourges n’est établie qu’en 1851, sur son emplacement actuel au nord de la ville, dans le faubourg Taillegrain (document 18). D’abord utilisée pour le transport des marchandises, elle s’ouvre peu après aux voyageurs avant de s’agrandir en 1862. A la fin du siècle, elle bénéficie d’une galerie d’accès couverte devant le bâtiment (document 19). Conçue pour desservir un petit centre régional, la gare de Bourges comprend un corps central qui permet l’accès aux quais, deux ailes latérales symétriques dans lesquelles se situent les locaux techniques, ainsi qu’un parvis d’accès sur le devant de la façade principale. Avant qu’un tramway ne desserve Bourges à partir de 1898 (voir fiche 8), les voyageurs n’ont à leur disposition que les omnibus des principaux hôtels et des fiacres pour aller de la gare à la ville. En 1852, on achève le percement de l’avenue de la Gare (actuelle avenue Jean Jaurès) et l’agrandissement de la rue Saint-Ambroix (actuelle rue Henri Laudier) afin de relier la gare au centre de Bourges. Cette nouvelle entrée de la ville rejoint la rue Moyenne, le centre-ville et le sud de Bourges. L’avenue de la Gare est élargie en 1907 (document 20).


Au milieu du XIXè siècle, la présence de la gare et des voies ferrées forme désormais une barrière infranchissable bloquant pour un siècle la croissance urbaine berruyère au nord. Ce développement modeste de l’urbanisation berruyère de 1830 aux années 1850 se traduit par une croissance faible de la population. A la même période, les usines Mazières s’installent à la périphérie de Bourges et provoquent son extension au sud (voir fiche 4).